Jean Bazaine
(1904 – 2001)
Aux yeux de Planque, Jean Bazaine appartient à cette famille de peintres qui ont su assimiler la leçon de Cézanne, celle, notamment, qu’il a donnée dans ses dernières aquarelles « qui ne sont faites que de taches de couleurs… ces miracles lumineux qui évoquent, qui suggèrent, qui obligent le spectateur à aller au-delà, à continuer l’œuvre apparemment inachevée ». La réalité de la peinture abstraite et l’actualité de son langage lui étaient apparues évidentes quelques années auparavant, un jour de 1952 où, réfugié dans une galerie en raison d’une forte pluie, il fut illuminé par les richesses et la profondeur de cette non-figuration qu’il n’avait cessé de rejeter auparavant. A plusieurs reprises Planque rend visite à Bazaine dès la fin des années cinquante et retient quelques toiles pour la galerie Beyeler. Il apprécie la gravité de cette œuvre qui ne se dérobe jamais à l’engagement qu’elle a pris de se livrer à l’inconnu, de face : pas de fausse séduction chez ce peintre qui avance en quête d’un surgissement, sans jamais céder aux facilités du métier, aux illuminations hâtives. Son interprétation du paysage, en des formes singulièrement réduites, tendues, abstraites, trouve sa cohérence dans l’organisation comme spontanée de la couleur à la surface de la toile. Le peintre fouille le sensible à la recherche de l’élémentaire : mobilité et transparence de l’eau traduites dans la structure cristalline d’une aquarelle qui s’étend sur un seul accord de bleu ; terres grasses, ombres drues et ciels épais dans ses huiles, comme dans la toile de petit format intitulée Espagne et datée de 1954 que le collectionneur chérissait.
Espagne, 1954
Huile sur toile
19 x 24 cm
© 2017, ProLitteris, Zurich